Le point sur les taux - À quoi s’attendre pour l’immobilier en 2024 ?

Après avoir été à un niveau plancher durant plusieurs années, les taux hypothécaires se sont emballés l’an passé atteignant les 4%, avant de redescendre autour de 3% aujourd’hui. Comment vont-ils évoluer désormais et qu’en conclure pour le marché immobilier? 

La hausse inédite des taux d’intérêt depuis la mi-2022 n’a pas été sans conséquence pour le marché immobilier. À quoi les investisseurs doivent-ils désormais s’attendre, et comment appréhender le marché en conséquence?

Il est communément admis que deux facteurs majeurs influencent mécaniquement les prix sur le marché immobilier:

  • La croissance de l’activité économique/du pouvoir d’achat (que l’on peut concrètement mesurer par le taux d’emploi/de chômage)
  • L’évolution des taux d’intérêt sur le marché du crédit hypothécaire, qui déplacent la barre de l’accès à la propriété, déterminent la puissance financière des acheteurs et rendent les allocations concurrentes (placements en dépôts à terme, en obligations, etc.) plus ou moins attractives par rapport à l’immobilier.

Ces taux dépendent en grande partie de ceux de la Banque Centrale Européenne (BCE), qui influencent directement les marchés obligataires et du crédit dans la zone euro.

Or, après une longue période de taux extrêmement bas (ils avaient même évolué en terrain négatif), les banquiers centraux ont dû remonter leurs taux directeurs de manière spectaculaire (10 fois d’affilée entre juillet 2022 et septembre 2023) pour juguler une inflation devenue hors de contrôle.

En conséquence, le crédit hypothécaire à 20 ans fixe, qui végétait entre 1% et 2% en Belgique à la fin de cette période très favorable aux emprunteurs, a bondi à 4% voire 5% l’an passé, provoquant au passage une baisse de 15% du nombre de transactions et des prix sur le marché immobilier.

Aujourd’hui (à la mi-juillet 2024), il est revenu à un niveau beaucoup plus attrayant, aux environs de 3%, par anticipation d’une première baisse de taux par la BCE qui s’est concrétisée le 6 juin dernier (taux de dépôt réduit de 0,25%, à 3,75%), soit un peu plus tôt qu’attendu, et d’un espoir que ce mouvement baissier se poursuive dans les prochains mois, l’inflation semblant enfin plus ou moins maîtrisée.

 

Quid des prochains mois?

 

  • Les marchés financiers (contrats à terme et anticipations des économistes) parient désormais sur une série de baisses de 0,25% des taux directeurs, qui totaliseraient un recul de 1% d’ici la fin 2024. Le taux de dépôt de la BCE, qui était encore de 4% début juin, fondrait donc à 3%.
  • Pour la suite, les anticipations divergent davantage, avec un taux de dépôt attendu entre 1,50% et 2,75% d’ici la mi-2025 selon les analystes.
  • Ces projections sont déjà en partie intégrées par les banques commerciales belges. Celles-ci prennent l’obligation d’État belge (OLO) comme principal ingrédient pour concocter leurs offres de crédits hypothécaires. Or l’OLO à 10 ans est passé d’un pic de 3,62% le 23 octobre dernier à un plancher de 2,51% le 21 décembre 2023, mais pour remonter à 3,13% au 13 juin 2024.
  • Rares sont en tout cas les observateurs qui anticipent un retour à des taux hypothécaires très bas de l’ordre de 1% ou 1,5%, même à plus long terme, estimant qu’il s’agissait à l’époque d’une situation anormale. Ils s’attendent plus raisonnablement à ce que ces taux se stabilisent aux alentours de 3%, voire légèrement sous ce pivot, compte tenu des baisses attendues du côté de la BCE.
  • Notons qu’en cas de variations importantes des taux, l’emprunteur-investisseur immobilier est, d’une certaine façon, toujours gagnant: s’il a figé son taux et que les taux s’envolent par la suite, il est protégé; et si les taux baissent au contraire (d’au moins 1% dit-on généralement, afin d’absorber les coûts d’un refinancement), il peut toujours renégocier son taux ou changer de banque moyennant un funding loss de 3 mois d’intérêts pour les particuliers et 6 mois d’intérêts pour les entreprises.

 

Conclusions pour le marché immobilier

 

  • Les professionnels du secteur s’attendent à un retour de la liquidité sur les marchés financiers à partir du second semestre de 2024, avec pour conséquence des attentes davantage à l’équilibre entre acheteurs et vendeurs et un retour progressif des grands investisseurs institutionnels sur le marché immobilier.
  • L’inflation étant retombée à des niveaux acceptables, les prix ayant chuté d’environ 15% suite à la forte hausse des taux et n’ayant pas encore remonté, nous sommes dans le creux de la vague niveau prix, avec un rapport de force plus favorable aux acheteurs que par le passé. Les loyers ayant fortement progressé (lire notre article à ce sujet), les prochains mois apparaissent comme particulièrement favorables pour les investissements immobiliers, dont tout indique que le rendement réel s’en trouvera renforcé.
  • Une force contraire est toutefois à l’œuvre: les contraintes grandissantes en matière d’efficacité énergétique dont l’investisseur devra nécessairement tenir compte s’il s’intéresse aux biens énergivores décotés. Non seulement parce que ces biens nécessiteront  à terme des rénovations, mais aussi parce que les banques ne manqueront pas de bientôt proposer des taux différenciés en fonction du PEB.
  • Par catégorie de biens, le commerce de détail connaît un certain renouveau après le désintérêt dû à la pandémie (dans les centres commerciaux et les rues commerçantes des centres-villes en tout cas); les kots d’étudiants, les appartements et les projets mixtes habitat-travail-loisirs font pour leur part l’objet d’une forte demande; et enfin les immeubles de bureaux resteront manifestement encore un bon bout de temps à la peine.

 

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